LA PAGE DU PUBLIC 2021
Dimanche 13 juin 2021 : organiste Frédéric Lamantia percussionniste Michel VisSe
Orgue en chansons, avec
Charles Aznavour, Michel Fugain, Anne Sylvestre,
Georges Brassens et Édith Piaf.
D’une façon générale, et avec un
certain plaisir, nous avons retrouvé le style des précédents concerts sur le
thème de l’“Orgue en chansons”. Le choix des airs, traités, retravaillés,
façonnés à la mode des deux compères, suivait, nous avait avertis Frédéric
Lamantia, un fil rouge : la spiritualité.
Cependant, si j’ai retrouvé ce “motiv”
dans “La prière” et “L’Auvergnat” de Brassens, dans “L’hymne à l’amour” de Piaf,
j’ai eu plus de mal avec les autres chansons : il faut avouer que je n’en
connaissais pas bien les paroles…
Je ne vais pas me livrer à une analyse suivie de chaque
pièce exécutée mais donner un (re)sentiment général sur la soirée entière : je
suis certainement l’un des rares, voire le seul, qui n’ai pas apprécié les
interventions bruyantes de la batterie, parfois clinquante (“Sur ma vie”) et –
je regrette de le dire – à la limite du ridicule dans “Les trois cloches” : il
eût mieux valu utiliser une véritable cloche (comme dans certains opéras) plutôt
que ces coups de cymbale répétés que “j’attendais” et qui arrivaient
ponctuellement.
Ensuite, sur le tempo de la
plupart des pièces : attaque douce, murmurée, puis installation de la mélodie,
un crescendo pour arriver à un fortissimo suivi d’un decrescendo jusqu’au piano,
pianissimo final. J’ai apprécié pour “Je n’aurai pas le temps”, pour “Une belle
histoire”, pour “Les trois cloches”.
Heureusement, il y eut deux
trouvailles qui valaient, à elles seules, qu’on assistât à ce concert : le
“feint” hommage à Bach en introduction à “L’Auvergnat” en forme de Toccata et
fugue en ré mineur, se transformant peu à peu naturellement en la mélodie bien
connue de Brassens. Ensuite (et l’organiste avait prévenu : Michel Visse, au
cours de sa longue et belle carrière à l’opéra de Lyon, a joué des centaines de
fois le “Boléro” de Ravel) donc, dès l’introduction, Michel Visse attaque mezzo
forte (promesse d’un crescendo qu’on devinait et attendait) les première phrases
de “Je ne regrette rien” avec les tap, tap‑tap‑tap,
tap‑tap‑tap‑tap‑tap‑tap‑tap‑tap et, comme chez Ravel, en permanence tout au long
de l’interprétation avec le grand crescendo qui s’acheva dans un éblouissant
“tutti” de l’orgue, et un tonnerre d’applaudissement, bien entendu.
Et,
dulcis in fundo,
il y eut un bis : “L’homme à la moto”, bien choisi pour un final endiablé,
tonitruant, comme on disait (naïvement) dans les années ’50, atomique ! Là, le
fil rouge de la spiritualité avait disparu ! Là le crescendo était de droit, le
fracas obligé, le heurt entre la moto et la train qui allait vers le midi au
passage à niveau, épouvantable et l’accord final plaqué par Frédéric Lamantia
entraîna un autre fracas, d’applaudissements, mérités.
En conclusion, un concert dont on pourra dire “J’y
étais” ! Et bravo aux artistes !
Orgue jazzy.
D’une façon générale, et avec
plaisir, nous avons retrouvé le style du précédent concert (24 septembre 2017)
sur le thème de l’“Orgue jazzy”. L’organiste, jeune, dynamique, sympathique et
plein de fougue, nous a fait faire un tour musical dans un monde qui a évoqué
pour beaucoup d’entre nous des souvenirs (de jeunesse ?)
Trois compositions de Rémi COLLIN et quelques standards
du jazz. Et il nous apprend que le jazz avait pénétré le monde soviétique entre
les années ’20 et ’40, que même le “petit père des peuples” appréciait ce style
que des compositeurs amis du régime avaient “russifié” à partir parfois de
thèmes traditionnels russes !
Les pièces « Le soleil de
minuit »de Rémi COLLIN, « In
the black sea » de Leonid UTYOSOV (voir le
site :
Leonid Utyosov — Wikipédia (wikipedia.org) ont
un petit air de valse russe. La « Fox Marche » de Alexander Tsfasman (voir le
site :
Alexander Tsfasman, chanteur de jazz swing soviétique – Blog de Dimas Suryo
(wordpress.com) est gaie, enjouée, enlevée.
Les créations de Rémi COLLIN sont agréables, la pièce
intitulée « Sans nom » a en fait une fonction bien précise : tester les orgues
neufs ou rénovés pour vérifier la qualité de la soufflerie et des registres, et
tout ceci sur un rythme de boléro bien enlevé.
Enfin, les standards : « Almost
like being in Love » de la comédie musicale « Brigadoon »
d'Alan
Jay Lerner et Frederick
Loewe, créée en 1947. Le célébrissime
« Summertime »
du « Porgy
and Bess » de Gershwin, le « I got Rhythm » de
« Un Américain à Paris » toujours de Gershwin, le « Singin’ in the Rain » du
film
américain réalisé par Stanley
Donen et Gene
Kelly réveillent des souvenirs et font
battre le rythme du pied.
Quant à la chanson française,
revisitée, remaniée par l’artiste, elle nous enchante : « Les feuilles mortes »,
paroles de Prévert et musique de Kosma, où l’organiste a su entremêler des
phrases mélodiques parallèles, crescendo et decrescendo, du plus bel effet.
Et le bis !
« On
the Street Where You Live », musique de
Frederick Loewe et paroles d’Alan Jay Lerner dans la comédie musicale « My
fair Lady »
(1956 à Broadway).
Rémi COLLIN y mit tout ce qu’il avait encore d’énergie et de fougue. Un beau
succès final !
Bravo, bravissimo, l’artiste !
Samedi 10 juillet : organiste
Frédéric MuÑoz *
chorégraphie
Cie Taffanel
Le président Dautry et Jackie Taffanel introduisent le
sujet : le spectacle auquel nous sommes conviés n’est pas ordinaire. Bien, nous
voici donc impatients de voir quelque chose… Las ! le début est fort laborieux,
toutes les danseuses restent à la tribune, à droite de l’orgue, dans l’angle et
le public mal placé (ceux qui sont au pied de la tribune) se tord le cou pour
essayer de voir quelque chose.
Il s’ensuit un effet comique : les spectateurs qui ne
voient rien de ce qui se passe se rendent compte que le spectacle a commencé et
qu’il suffirait de changer de place pour y assister ; mais changer de place au
cours d’un concert ! ça ne se fait pas ! et puis si, une ou deux personnes osent
et j’assiste alors de loin (moi je suis toujours au fond, près de la porte) à un
ballet d’un genre nouveau, impromptu, de gens de tout âge, de toute condition
qui se lèvent (qui osent se lever pendant que l’orgue
joue) et en une danse à contrario suivent les évolutions des quatre nymphes.
L’orgue : j’ai trouvé que les doigts du maestro ont
toujours cette grande facilité à courir sur les claviers, les registres sont
bien choisis mais… c’est plat, monotone, qu’il nous propose du baroque, de
l’arabo-andalou, du contemporain, pas ou très peu de nuances, l’orgue sonne bien
mais Dieu merci, c’est sa grande qualité : il sonne bien !
Et puis, mon point de vue de
metteur en scène (si je l’étais) : pourquoi l’organiste, de son côté, ayant
terminé une partie, s’arrête, range tranquillement les partitions, installe les
prochaines, se remet en selle, un coup d’œil rapide à la salle et on attaque le
Ligetti ou le Godard, alors que pendant ces instants d’interruption de mélodie,
les quatre jeunes femmes continuent à agiter les bras (excusez-moi, je ne peux y
résister, elles
'brassègent') à agiter les
jambes, le corps les mains dans le silence le moins expressif qui soit. Pourquoi
ne pas avoir imaginé un arrêt sur image, que toutes les quatre se figent dans
l’attitude (à étudier) qu’elles avaient quand l’orgue s’est tu, et reprendre et
finir le geste ébauché dès la reprise de la mélodie ? Pourquoi ? S’il y a une
raison, je serais heureux de la connaître….
Cependant elles profitent bien de l’espace et des lieux :
escalade de la chaire pour une prise d’assaut, grand balancement de la coiffure,
de longs cheveux quand l’une d’elles est en chaire, saut sur la sainte table
pour s’y allonger, ou s’allonger sous la table (le message est à la limite…)
Mais - tout de même – un très bon
point : le final. Toutes les égéries se retrouvent à la tribune, côté clavier,
et le maestro a déjà entamé
Lo
ballo dell’Intorcia
(la danse des Torches) de Antonio Valente : les
quatre jeunes femmes commencent une série de contorsions pseudo-érotiques qui
aboutissent dans le dos de Frédéric Munoz, en des frôlements, des caresses, des
allusions qui pourraient, - pourraient, - faire rêver certains …
Vous comprenez où se dirige mon commentaire en
conclusion : intéressant car nouveau, à améliorer largement, à aller voir
ailleurs, à Entraygues-sur-Truyère ? à Villeurbanne ? ou - je rêve – à
Saint-Guilhem-le-Désert !
Jean-Pierre FAUQUIER
Le 10 juillet, l’AOTV avait programmé un concert-spectacle, événement très particulier, avec toujours la volonté de faire connaitre l’orgue à des publics différents. J’avais depuis longtemps pensé à cette association orgue et danse, puisque nous avons la chance d’avoir à Montpellier une chorégraphe connue (Jackie Taffanel) et au Vigan un orgue magnifique : j’ai donc pensé à sa compagnie.
Jackie Taffanel qualifie cet événement de « performance », nom donné de nos jours à des manifestations d’art contemporain. Bien sûr, ce fut contemporain, décoiffant, et peut-être jusqu’à la provocation, au point que j’ai dû demander aux danseuses, en assistant à la répétition, d’avoir plus de réserve dans l’utilisation de la table dite « sainte ». Mais pour les protestants les objets ne sont pas « saints », et cette table n’est objectivement qu’une table, sauf pour certains qui restent attachés à l’idée qu’elle est sacrée.
Il faut dire un mot de la partie musicale : c’est
Frédéric Muñoz qui avait choisi les œuvres qu’il avait enregistrées pour le
travail de la chorégraphe et des danseuses. Ces pièces d’orgue constituaient
elles-mêmes un concert un peu disparate auquel la musique hispanique donnait des
couleurs bienvenues.
Il faut préciser que les danseuses affirment pouvoir
danser sur toutes les musiques, dansantes ou pas, et elles se sont efforcées de
traduire dans leur expression corporelle les sensations, émotions, qu’elles
ressentaient. On peut certes s’étonner que leur gestuelle ne paraisse pas
s’accorder à la musique, mais d’après J. Taffanel il ne fallait pas rechercher
une adéquation étroite entre cette musique et la chorégraphie qui l’accompagne :
il s’agit d’une performance et non d’un ballet… où la part de l’improvisation
joue un rôle majeur.
Donc, concert-spectacle décoiffant, c’est vrai, mais
malgré tout très apprécié d’un public dont une partie, avertie, était venue tout
exprès, concert qui fera date dans la programmation de l’AOTV.
Michel Dautry, président de l’AOTV